Le droit des entreprises en difficulté est marqué par la nécessité d’arbitrages entre des intérêts contradictoires. Véritables acteurs des procédures s’appliquant aux entreprises en difficulté, les différents créanciers possèdent des droits, dont celui du paiement de leurs créances.

Les objectifs de la protection des créanciers

1. Le maintien de l’emploi

L’objectif principal du législateur en 2005 a été de renforcer les chances effectives de sauvetage de l’entreprise en favorisant l’anticipation des difficultés et leur résolution par la négociation. Il s’agit de pérenniser l’entreprise et de maintenir les emplois des salariés dans le cas des procédures de sauvegarde, de redressement et de liquidation.

2. Le règlement des dettes

Le paiement des créances est un des objectifs du traitement des difficultés de l’entreprise. La négociation et la finalisation d’accords avec les créanciers, en vue de l’obtention de remises de dettes, sont au cœur des procédures. Le paiement du passif s’effectue en fonction des actifs restant pour régler les dettes.

La distinction entre les créanciers

Tous les créanciers ne sont pas traités de la même façon.

1. Les créanciers superprivilégiés

Les salariés sont des créanciers particuliers du fait du caractère alimentaire de leur créance. La rémunération qui leur est due au titre des 60 derniers jours de travail qui précèdent le jugement d’ouverture bénéficie d’un superprivilège. C’est une créance prioritaire, qu’il s’agisse d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires.

Si les fonds appartenant à l’entreprise en difficulté en permettent le paiement, les salariés doivent être payés dans les 10 jours suivant le jugement d’ouverture. Si les fonds sont insuffisants, les salaires sont pris en charge par l’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS). L’AGS devient créancier de l’entreprise et prend la place du salarié dont elle a avancé les créances pour récupérer les sommes avancées.

2. Les créanciers privilégiés

Il s’agit des créanciers qui peuvent, en vertu de la loi, obtenir le recouvrement de leur créance avant les autres. Le Trésor public et les organismes sociaux font parue des créanciers privilégiés car ils sont porteurs des créances de la collectivité. Leur paiement doit donc être prioritaire (exemple : les frais de justice).

3. Les créanciers chirographaires

Ce sont des créanciers simples, sans privilège, ni garantie, ne bénéficiant donc d’aucune priorité de paiement (exemple : les fournisseurs).

a) Les créanciers antérieurs à la procédure collective

Le jugement ouvrant la procédure interdit de payer toute créance née antérieurement. Il arrête les poursuites judiciaires engagées par les créanciers pour obtenir le paiement de leurs créances. En outre, les créances nées antérieurement au jugement d’ouverture et non encore payées ne peuvent pas produire d’intérêts.

b) Les créanciers postérieurs à la procédure collective

Les créanciers qui, avertis des difficultés de l’entreprise en situation de sauvegarde ou de redressement, continuent de travailler avec elle ont des avantages et bénéficient de garanties de paiement accrues.

Exemple : un fournisseur qui continue de livrer un client en cessation de paiements, lui permet de poursuivre sa production et contribue à favoriser son redressement.

Ces créanciers postérieurs bénéficient ainsi d’un traitement de faveur dans la mesure où leurs créances doivent être payées à leur échéance tandis que le paiement de toutes les autres créances nées avant le jugement d’ouverture de la procédure est suspendu jusqu’à la décision finale du tribunal.

Devenant créanciers privilégiés, ils disposent d’une priorité de paiement sur la majorité des créanciers antérieurs. Ainsi, si l’entreprise connaît une aggravation de ses difficultés rendant impossible le recouvrement de la créance à la date prévue, le créancier bénéficie d’un privilège, à mettre en œuvre le jour du règlement définitif de la situation.

Le sort des créanciers

1. Dans le cas de la continuation de l’entreprise

Le tribunal peut décider d’un plan de continuation ou d’un plan de redressement en prenant des mesures sur le long terme, 10 ans au maximum. Il donne ainsi des chances de survie à l’entreprise en difficulté.

Exemple : échelonnement des échéances, effacement de dettes.

Les créanciers sont consultés avant l’adoption définitive des mesures, par l’intermédiaire d’un administrateur qui négocie directement avec les créanciers pour les PME ou avec des comités représentant les créanciers dans les grandes entreprises.

2. Dans le cas de la liquidation de l’entreprise

Il y a vente, de gré à gré ou aux enchères, de tous les éléments de l’actif de l’entreprise pour apurer son passif. Un liquidateur répartit les fonds issus de la cession des actifs entre les différents créanciers, en tenant compte de l’ordre de paiement prévu par le droit : d’abord les titulaires d’une créance privilégiée, ensuite les créanciers chirographaires, qui se partagent le reliquat en fonction des montants respectifs de leur créance.

Enfin, le tribunal constate la clôture de la liquidation et, le cas échéant, l’insuffisance d’actif.