Le fonctionnement de toute entreprise est source de conflits de pouvoir car il repose, en interne, sur des individus et des groupes, les salariés, qui ont des objectifs promu et rarement concordants, et, en externe, sur les agents économiques, consommateurs, clients, fournisseurs, actionnaires, administrations, etc., qui agissent également en fonction de leurs propres objectifs.

La nature des relations qui se nouent entre les acteurs au sein de l’entreprise et avec les partenaires extérieurs influence de façon déterminante son mode de gouvernance. Le dirigeant doit en permanence arbitrer entre les attentes des différents parties prenantes, qui peuvent constituer autant de contre-pouvoirs.

Les parties prenantes internes

L’expression « parties prenantes » fait référence à la volonté de chacun des acteurs de bénéficier d’une fraction de la valeur ajoutée produite par l’entreprise.

Les premiers bénéficiaires de la répartition de la valeur ajoutée sont les salariés au travers des salaires.

1. Les salariés et leurs représentants

a) Les salariés

Les salariés constituent le capital humain essentiel à l’activité et au développement de l’entreprise et donc, de fait, un contre-pouvoir puisque les objectifs de l’entreprise ne peuvent être atteints sans leur participation active, alors même que leurs objectifs personnels divergent parfois des objectifs communs.

Pour défendre leurs intérêts, les salariés s’appuient sur leurs élus :

  • Les délégués du personnel dans tous les établissements de plus de 10 salariés.
  • Le comité d’entreprise, obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés.

b) Les syndicats

Les syndicats représentent un contre-pouvoir à la fois interne, grâce aux représentants syndicaux de l’entreprise, et externe, au niveau national. Selon les termes du Code du travail, ils sont seuls habilités à représenter les salariés dans le cadre des négociations collectives des conditions générales de travail. Leur contre-pouvoir s’exprime souvent de façon conflictuelle (grève, etc.).

2. Les relations de pouvoir dans l’entreprise

Les dirigeants doivent en permanence arbitrer entre les objectifs des salariés et l’objectif commun. Ceci amène les économistes R. Cyert et J. March à montrer que les objectifs poursuivis par l’entreprise ne seront donc pas rationnels, mais représentent le meilleur compromis possible entre les objectifs des diverses coalitions d’individus qui la composent.

Ces coalitions d’individus ayant des buts différents, elles doivent négocier entre elles, ce qui conduit aux prises de décisions.

Pour éclairer le jeu de pouvoirs et contre-pouvoirs dans l’entreprise, M. Crozier, sociologue français, montre que, dans l’entreprise, tout le monde peut avoir du pouvoir car il est le produit de relations, négociations et confrontations dont l’issue reste toujours incertaine.

Les parties prenantes externes

1. Les consommateurs et les clients

L’intérêt des clients et des consommateurs, acheter au meilleur prix, est parfois contradictoire avec celui de l’entreprise, qui consiste à fixer des prix qui lui permettent de réaliser des profits et de satisfaire ainsi à ses objectifs de rentabilité.

Les consommateurs et les clients de l’entreprise exercent deux types de contre-pouvoir : actif par le biais des associations de consommateurs et passif en faisant jouer la concurrence sur les prix.

2. Les acteurs de la société civile

L’État et les administrations prélèvent une part de la valeur ajoutée de l’entreprise en impôts, taxes et cotisations diverses. Mais c’est au travers des lois et des règlements qu’ils exercent une contrainte collective et donc un contre-pouvoir.

En outre, la société civile impose à l’entreprise d’être socialement responsable, c’est-à-dire de se soucier de sa rentabilité et de sa croissance, mais également de ses impacts environnementaux et sociaux.

3. Les actionnaires

Les actionnaires sont les propriétaires de l’entreprise, si elle a la forme d’une société de capitaux, qui ont délégué leur pouvoir de décision.

a) La gouvernance de l’entreprise

La gouvernance constitue un mode d’arbitrage entre les intérêts contradictoires des différentes parties prenantes et, en particulier, entre les actionnaires et les dirigeants. Lorsque l’entrepreneur est l’unique ou le principal propriétaire de l’entreprise, les problèmes de gouvernance n’existent pas.

Mais dès lors qu’il existe une séparation entre les propriétaires et les dirigeants salariés, se pose la question de la pratique du pouvoir compte tenu des divergences d’intérêts qui peuvent exister entre eux.

On distingue deux modèles de gouvernance :

  1. La gouvernance managériale laisse aux dirigeants la plus grande part du pouvoir.
  2. La gouvernance actionnariale se traduit par un contrôle direct de l’entreprise par les actionnaires et s’impose depuis les années 1980.

b) Les enjeux liés aux intérêts des actionnaires

Les actionnaires exercent leur contre-pouvoir au sein des assemblées générales et des conseils d’administration. Ils suivent les nominations des dirigeants, leur rémunération, l’orientation stratégique de l’organisation, etc. Ceux-ci devront donc exercer leur pouvoir de gestion en tenant compte du contre-pouvoir des actionnaires et en assurant une rentabilité minimale des capitaux pour satisfaire à leurs exigences de dividendes.