Face à l’apparition de nouveaux risques et a la volonté sociale d’éliminer leurs conséquences négatives, la prévention consiste à les anticiper pour les supprimer ou les réduire. Si le risque est inconnu et ne peut donc être prévenu, il faut appliquer le principe de précaution.

La prévention des risques au travail

1. Le principe de prévention

Le principe de prévention consiste à anticiper et à prendre des mesures permettant d’éviter objectivement un risque, ce qui suppose sa connaissance.

La prévention passe d’abord par l’évaluation du risque. Au niveau de l’entreprise, il s’agit tant de prévenir les risques technologiques et environnementaux que d’agir pour la prévention en matière de protection de la santé du salarié au travail. Celle-ci est devenue une préoccupation majeure sous l’impulsion du droit communautaire.

Exemple : une directive du 12 juin 1989 impose à l’employeur « d’assurer la sécurité et la santé des travailleurs dans tous les aspects du travail » et de prendre « les mesures nécessaires pour la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, y compris les activités de prévention des risques professionnels », notamment en évitant les risques, en évaluant ceux qui ne peuvent être évités, en les combattant à leur source et en planifiant la prévention.

Désormais, le législateur et le juge s’attachent à construire une véritable politique de protection de la santé en milieu de travail.

Exemple : depuis 2008, la Cour de cassation permet aux magistrats d’exercer un contrôle préalable des décisions d’un employeur en matière d’hygiène ou de sécurité de ses salariés.

2. Les risques liés à la santé au travail

a) Les atteintes à la santé physique et mentale

Les conditions de travail peuvent comporter des risques pour la santé physique des salariés, ainsi que des risques psychosociaux. Il revient à l’employeur d’évaluer ces risques et de prendre les mesures nécessaires pour assurer et protéger la santé physique et mentale ainsi que la sécurité de ses salariés.

Exemple : un accord national interprofessionnel (ANI) a été conclu le 2 juillet 2008 pour lutter contre le stress lié au travail ; dépression, suicides.

b) Le harcèlement moral

Le harcèlement moral d’un salarié se définit ainsi comme « les agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel« .

L’employeur doit rappeler dans le règlement intérieur l’interdiction de toute pratique de harcèlement moral. Au-delà de ce rappel, il doit être un véritable acteur de la prévention du harcèlement moral dans son entreprise en planifiant des actions de sensibilisation sur le sujet ou un système d’alerte.

En cas d’échec de sa politique de prévention, l’employeur doit user de son pouvoir disciplinaire pour mettre fin au harcèlement et préserver la santé des salariés. Il doit licencier le salarié coupable de harcèlement.

Le harcèlement moral est condamné par la justice, depuis la fin des années 1980, sur le fondement de la bonne foi dans l’exécution du contrat de travail et de l’obligation de protéger la santé des travailleurs. La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a introduit la notion de harcèlement moral en droit français. Le harcèlement moral est un délit puni jusqu’à 2 ans de prison et 30 000 euros d’amende. Des dommages et intérêts peuvent en outre être versés.

S’il appartient au salarié d’établir la matérialité des faits qu’il invoque, les juges doivent, quant à eux, appréhender ces faits dans leur ensemble et rechercher s’ils permettent de présumer l’existence du harcèlement allégué. Il revient alors à l’employeur d’établir qu’ils ne caractérisent pas une situation de harcèlement.

3. Une obligation de résultat de sécurité
de l’employeur

a) La responsabilité de l’employeur

Une obligation de résultat de sécurité est à la charge de l’employeur.

L’employeur doit assurer à chaque travailleur le résultat attendu, c’est-à-dire la protection de sa santé au travail. En cas de défaut de résultat, c’est-à-dire en cas de dégradation de la santé causée, même seulement en partie, par le travail, l’employeur est présumé responsable d‘une défaillance fautive.

L’obligation de sécurité de l’employeur est une obligation de résultat. Par conséquent, seul un cas de force majeure peut l’exonérer de sa responsabilité.

b) La méthodologie de la prévention

L’employeur doit repérer le risque et l’identifier pour le supprimer en le combattant à la source. Dans le cas où il ne pourrait l‘éradiquer, il doit mettre en place des protections collectives et individuelles, complétées par des mesures d’information et de formation des salariés.

L’employeur doit organiser la prévention dans toutes les fonctions et tous les niveaux de son entreprise selon « les principes généraux de prévention« , dont celui de l’évaluation des risques professionnels. Il doit planifier sa démarche dans des dispositions humaines, techniques et organisationnelles en vue de l’amélioration continue des situations de travail. Un décret de décembre 2008 lui impose de tenir à jour « un document unique d’évaluation des risques professionnels« .

4. Le rôle des autres intervenants

a) Le médecin du travail

La médecine du travail est une médecine exclusivement préventive qui a pour objet d’éviter toute altération de la santé des salariés du fait de leur travail. Le médecin du travail surveille l’état de santé des salariés, les conditions d’hygiène du travail et les risques de contagion. La médecine du travail est obligatoirement organisée, sur le plan matériel et financier, par les employeurs et placée sous la surveillance des représentants du personnel. La médecine du travail bénéficie à tous les salariés, quelle que soit la taille de l’entreprise.

Le médecin du travail conseille l’employeur sur l’amélioration des conditions de vie et de travail dans l’entreprise, la sécurisation et l’adaptation des postes.

b) L’inspecteur du travail

Il contrôle l’application de la réglementation du travail dans tous ses aspects et contribue notamment à la prévention des risques professionnels, ainsi qu’à l’amélioration des conditions de travail et des relations sociales.

c) Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT)

Émanation du comité d’entreprise, le CHSCT est sollicité pour tout ce qui a trait à la santé et la sécurité des salariés dans l’entreprise. Sa consultation est obligatoire, par exemple, pour la mise en place de l’élaboration du document unique d’évaluation des risques professionnels. Constitué dans tous les établissements occupant au moins 50 salariés, il a pour mission de contribuer à la protection de la santé et de la sécurité des salariés ainsi qu’à l’amélioration des conditions de travail.

d) Le droit d’alerte et de retrait

Une loi de décembre 1982 a reconnu un droit d’alerte et de retrait au bénéfice du salarié qui a un motif raisonnable de penser que la situation dans laquelle il se trouve présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

Le droit du travail donne ainsi aux salariés un rôle dans la prévention des risques dans l’entreprise. Le droit d’alerte et de retrait leur permet notamment d’avertir l’employeur et/ou d’arrêter leur travail en cas de danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé. La notion de danger grave et imminent est une menace immédiate susceptible de porter atteinte à l’intégrité physique des travailleurs. Il ne s’agit pas d’un risque habituel inhérent à la nature même d’un travail reconnu dangereux.

Le principe de précaution

1. L’énoncé du principe

La précaution est une attitude et un principe d’action face à un risque plausible, bien qu’encore incertain d’un point de vue scientifique. Né de considérations environnementales relativement récentes, le principe de précaution est invoqué si le risque est inconnu : les incertitudes ne doivent pas retarder l’adoption des mesures préventives.

Il s’agit de guider les actes des dirigeants des organisations en renforçant l’expertise, la transparence et l’anticipation des risques de leur activité. Le principe de précaution doit permettre un bon équilibre entre l’anticipation et la prudence d’une part, le développement et l’innovation d’autre part.

Exemple : affaires de « la vache folle », du sang contaminé, des antennes relais de téléphonie mobile, des OGM.

Le principe de précaution oblige à mettre en œuvre des actions de prévention face à des risques dont l’existence n’est pas scientifiquement avérée, sans attendre les certitudes sur l’existence du danger, l’étendue des dommages ou les relations de causes à effet.

2. La valeur juridique du principe

Le principe de précaution s’impose en France via la Charte de l’environnement. Il s’agit d’une loi constitutionnelle de mars 2005 à laquelle renvoie le préambule de la Constitution.

Il tend à s’imposer en Europe, via le traité de Maastricht de 1992, dans les domaines de l’environnement, de la sécurité alimentaire et de la santé. L’Union européenne s’engage progressivement dans un processus de généralisation du principe de précaution.

L’obligation de sécurité

Le « risque sécurité » inhérent aux ventes de biens et services articule les principes de prévention et de précaution.

1. La précaution face au risque sécurité

Depuis 1983, il existe une obligation générale de sécurité applicable à tous les produits et à tous les services. Le Code de la consommation définit ainsi cette obligation : « Les produits et les services doivent, dans des conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes.« 

Les produits disponibles à la vente ne doivent pas, dans des conditions normales ou prévisibles d’utilisation clairement portées à la connaissance du consommateur, présenter de dangers pour la santé ou la sécurité de celui-ci.

Les professionnels ont donc une obligation générale de sécurité concernant les produits et services qu’ils fabriquent, réalisent ou commercialisent.

2. La prévention du risque sécurité

Les pouvoirs publics interviennent pour réglementer ou, le cas échéant, interdire la mise sur le marché de produits et de services dangereux.

Lorsqu’un bien présente un risque sécurité, il doit être retiré du marché suivant une procédure rapide et simple.